Ostéo-micronutrition
Ostéopathie traditionnelle et terrain nutritionnel
Il était une Foie l’inflammation ! Ou l’inflammation racontée aux ostéos mise à jour le 01/07/09
Redoutée par tous les thérapeutes, elle est l’objet d’une chasse sans merci, il faut, l’endiguer, la freiner, la casser. L’ostéopathe n’est pas le dernier dans cette croisade mais peut être le moins armé contre cet ennemi de l’ombre, du moins le croit il…
Qui est-elle vraiment ? D’où vient-elle et est elle si diabolique?
1- Petite histoire de l’inflammation
Tout commence dans votre assiette…
Un simple jaune d’œuf ou cette savoureuse peau de poulet, concentrée de saveurs,
dorée et craquante, sont les principaux dealers de l’Acide Arachidonique.
Cet Acide gras, dont la principale source autrefois était l’huile d’arachide, est un solide maillon de notre inflammation. Bien évidemment d’autres sources vont approvisionner nos réserves et une synthèse endogène est toujours possible, car, il faut le souligner, cet A.A. ( Acide Arachidonique) appartient à la grande famille des Oméga 6.
De notre assiette, le voyage se continue vers nos entérocytes, qui vont, via le système lymphatique et avec la complicité non négligeable du foie, distribuer cet A.A. et ses précurseurs (les Omégas 6) vers nos cellules.
Ils vont alors participer à la construction des membranes cellulaires sous la forme d’une
double couche de phospholipides. Nous reviendrons plus tard sur l’importance de cette barrière
fluide qui protège la cellule durant toute sa vie.
Notre A.A. jouera alors son rôle protecteur, jusqu’au décès cellulaire, en moyenne moins de
dix ans après sa naissance, mais ce n’est qu’une moyenne ! Un entérocyte monte sur son tapis glissant, jusqu’ en haut de la villosité en 5 à 7 jours après quoi il disparaît dans le flux de nos selles (triste sort !), d’autres cellules intestinales vont vivre 16 ans, 15 jours pour la peau, 4 mois pour les globules rouges, 300 à 500 jours pour notre foie[1] … Que d’inégalité dans le monde cellulaire !
Lors d’une agression, quelle qu’elle soit, il va falloir alerter rapidement les voisines et préparer une défense efficace afin de protéger le tissu. Nous retrouvons alors notre AA[2] qui va jouer son ultime rôle (qui va le rendre célèbre !). La membrane détruite va transmuter ses acides gras, sous l’effet d’enzymes spécialisées, en eicosanoÏdes. Les eicosanoïdes sont des messagers d’alerte et d’amplification de la réponse inflammatoire.
Les enzymes en question sont des lipoxygénases et des cyclooxygénases, qui ont été nommés familièrement par ceux qui les fréquentent quotidiennement, les COX et les LOX. A partir de là, vous l’aurez compris, si l’on veut casser une inflammation il suffit d’exterminer les COX et les LOX. Nous savons faire cela grâce aux A.I.N.S. (Anti Inflammatoire Non Stéroïdiens).
- De cette petite histoire de l’inflammation, le chimiste retiendra l’importance de freiner une réponse anarchique par l’utilisation de substances qui empêchent l’A.A. de se jeter sur les COX et les LOX.
- Le nutritionniste pour sa part retiendra que moins il y aura d’A.A. dans l’assiette, moins il en arrivera sur les membranes, et moindre sera la réaction inflammatoire en cas d’agression.
Ils ont tous les deux raisons, mais ce n’est que la version courte du film, il nous manque beaucoup d’acteurs…
2- La grande histoire
Comment croire qu’un mécanisme physiologique puisse être la source de tant de maux ? Notre créateur aurait il fait une erreur, un bug dans la programmation de la machine humaine ?
Gardons une confiance toute Stillienne dans la perfection biologique et acceptons que l’inflammation soit une réaction adaptée, programmée et protectrice pour son terrain.
L’inflammation est l’archétype de la réaction immunitaire, la réponse la plus simple, la plus rapide et la plus généraliste, donc la moins adaptée (en comparaison des autres). Elle appartient à l’inné, et sera notre défense propre lors des premières heures de vie, une protection inductible et rapide qui va pouvoir alerter l’immunité acquise pour une réponse, plus lente mais plus précise.
Quelquefois le mécanisme peut s’enrayer et la réponse physiologique va devenir pathologique, soit par un enthousiasme qui va la conduire vers un état aigu ou suraigü, soit par une paresse à s’accomplir jusqu’au bout et devenir chronique et trainer des semaines, des années[3].
Son déroulé idéal comprend trois séquences :
Le terrain de l’agression sera une muqueuse, bien souvent, cette interface
avec le monde n’aime pas les agresseurs, mais s’y prépare quand même,
c’est son Karma ! Des poils, des cils, un péristaltisme, un mucus bien gluant, sont là pour minimiser l’impact des troublions, que ce soit au niveau épidermique, génital, intestinal que respiratoire. La gestion de ce terrain est dévouée au système nerveux autonome, voilà le premier acteur d’une guerre passive et bien souvent résolutive.
Rajoutons à cela une flore commensale, ces animaux qui nous peuplent, plus nombreux que nos propres cellules, et qui occupent le terrain muqueux, se permettent même de diriger notre immunité…Sont ils nous ou étranger ? Ceci est une autre histoire.
Dès l’agression commise il faut réagir, contenir et prévenir.
Un recrutement de cellules spécialisées est organisé, sur place par des résidentes (les macrophages) ou des délatrices ( les mastocytes par exemple) et aboutit à l’arrivée in situ de cellules sanguines policières, les polynucléaires neutrophiles.
Une flopée de médiateurs sont déjà partis pour que la réponse soit rapide et efficace (l’histamine des mastocytes, la sérotonine des plaquettes, des cytokines provenant de victimes locales…)
Merci l’histamine, elle organise l’œdème local qui ferme les sphincters post-capillaires et ouvre les pré- capillaires : en augmentant les échanges, le temps de contact ; cela cantonne l’agresseur et le maintient sous le joug des policiers qui arrivent en nombre. A distance, elle stimule au niveau général, par les prostaglandines leucotriènes, et autre kinines, la production centrale et prépare la phase d’amplification
de la réponse.
Localement : phagocytose, cyto-toxicité par les Natural Killer
(ça fait peur !), augmentation de la sécrétion de N.O.
(Monoxyde d’azote), conduisent à l’extermination de l’agresseur,
mais il faut alerter l’ensemble du corps, ce sera le travail
des cytokines. Parmi elles, trois (Interleukine 1, interleukine 6
et TNF alpha) vont nous intéresser car elles engendrent la généralisation de ce combat.
Le conflit devient donc mondial, les alliés s’en mêlent !
- L’interleukine 1, au tropisme cérébral, elle déclenche la fièvre, il faut sur-activer la circulation sanguine et la production des acteurs défensifs ; le système nerveux central (l’hypothalamus) est engagé. Il va mettre au repos, provoquer la somnolence, freiner les fonctions digestives, donc déclencher une anorexie, toutes les forces physiologiques sont tournées vers la production défensive.
L’effort de guerre est lancé par le grand commandeur central !
- Le TNF alfa va augmenter la réponse périphérique générale.
- L’interleukine 6, va recruter, avec un peu de retard, le Foie pour
qu’il produise ces fameuses protéines de l’inflammation.
Mais qui sont-elles ? Il faut souligner que la défense a autorisé la production de nombreuses armes de destructions massives qui commencent à se retourner contre nous : les protéases. Elles sont chargées de découper en petits bouts, les morceaux d’agresseurs, afin qu’ils disparaissent définitivement. Oui mais voilà, nos muscles sont aussi fait de protéines, alors il faut limiter dans le temps cette production dangereuse sous peine de cachexie. Le foie va donc concourir à cet effort par la fabrication d’anti-protéase (anti-trypsine, anti-chimotrypsine, la C Réactive Protéine qui fragmente des acides nucléiques pour qu’ils s’éliminent et ne deviennent pas des haptènes…).
Le foie est donc un acteur incontournable, qui amène l’inflammation vers sa phase de réparation.
Nous n’avons pas parlé, par souci de lisibilité, de tous les acteurs biochimiques, de l’oxydation nécessaire à cette guerre sans merci, et qui va provoquer des dégâts locaux mais aussi à distance. L’ennemi explosé, il faut que cesse le conflit sous peine d’une détérioration générale de toutes les fonctions du corps. Il faut aussi rendre au tissu local son intégrité. Ainsi, des médiateurs vont freiner la réaction, produire des facteurs de croissance, enclencher une néo vascularisation, provoquer la migration de cellules endothéliales sur site : la cicatrisation débute.
On assiste à l’arrivée des fibroblastes à la fabrication de glucosamine, de polyglycanes, de collagène : la restauration du tissu conjonctif est en marche, la lymphangiogénèse suivra.
Ces cytokines qui ont mis le feu vont savoir maintenant l’éteindre,
par l’action sur le foie, (envoie nous des anti protéases STP !)
et en stimulant l’axe hypothalamo-hypophysaire
(axe CRF – ACTH- Glucocorticoïdes) merci les surrénales
de bien vouloir nous aider dans ces moments difficiles !
Voilà la grande histoire racontée en raccourci.
Que peut en conclure l’ostéopathe ?
Ne relisez de cette histoire que les caractères en gras… Rapide et efficace.
Vous connaissez désormais les acteurs de l’inflammation, leurs phases et avec votre esprit éveillé et vos doigts pensants vous saurez où le système a failli. Pourquoi cette inflammation ne s’est pas résolue ?
Vous irez plus loin que ces caractères en gras, jusqu’à la dysfonction artérielle, veineuse ou lymphatique, en amont du système qui n’a pu jouer son rôle propre dans cette épopée. Trouvez la lésion, traitez là et laissez faire, j’ai envie d’ajouter regardez les mécanismes de la vie se dérouler.
Une inflammation locale est une porte d’entrée, qui généralise une réaction à tout le corps. Si elle dure plus de trois semaines, ce n’est pas normal et tous les systèmes vont souffrir de cette oxydation permanente, de ce potentiel inhérent tourné vers la défense, au détriment des autres fonctions.
Alors peut survenir une dysfonction à distance, qui n’aura de lien avec l’inflammation que le terrain délétère qui s’est installé. L’ennemi est parti depuis longtemps, il n’était pas forcément sur le terrain en difficulté aujourd’hui, l’inflammation persiste anormalement et recrute tous les acteurs inutilement.
Votre action bénéfique devra donc aider à la résolution de cet état inflammatoire chronique, ces inflammations que l’on nomme de bas grades, une vigilance de fond qui passe inaperçue au praticien trop obnubilé par la plainte immédiate de son patient. Des marqueurs biologiques existent pour cet état, comme la CRP Ultra Sensible (précision <1) qui doit justement être <1.
- Avons-nous suffisamment insisté sur l’importance du Foie : toute inflammation chronique, récurrente perturbe la fonction hépatique, on notera une augmentation légère de la bilirubine.
- Avons-nous suffisamment insisté sur l’intestin et sa flore dans la balance immunitaire ? Sûrement pas, nous aurons l’occasion d’en reparler.
- Avons-nous suffisamment insisté sur l’intérêt d’une alimentation qui modère la réponse inflammatoire tant par les médiateurs lipidiques que par la gestion des protéines ? Encore un sujet à développer.
Nous terminerons ce rapide exposé avec une question flash :
Que représente la Vitesse de Sédimentation dans l’inflammation ?
A vos claviers pour trouver la réponse… vous avez droit à 4 clics…A moins que vous ne connaissiez déjà la réponse, dans ce cas bravo.
G.C.
Cet article est un texte de vulgarisation pédagogique destiné aux ostéopathes qui sacrifie le détail au profit de la compréhension. Pour plus de précision merci de vous référer aux sources.
[1] chercheurs suédois de l'institut Karolinska de Stockholm, dirigée par Jonas Frisén : site Futura-science.com
[2] http://www.gremi.asso.fr/ = groupe de recherche et d’étude des médiateurs de l’inflammation
[3] Troisième cause de mortalité après les affections cardio-vasculaires et les cancers : Module 8 immunologie- réaction inflammatoire, Lionel PRIN (CHRU Lille), Eric HACHULLA (CHRU Lille),Bernadette HENNACHE(CHRU Lille), Bernard BONNOTTE (CHU Dijon), Sylvain DUBUCQUOI (CHRU Lille), Michel ABBAL (CHU Toulouse), Gilbert FAURE (CHU Nancy), Paul BOULETREAU (CHU Lyon)
[4] Conférence Docteur Martine Charles, inflammation et Phytothérapie, Toulouse
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